La vague d’extrême digitalisation bouleverse les business models des entreprises et oppose à première vue disrupteurs et disruptés. Qui sortira vainqueur dans 5 ans de leur affrontement ? Pas forcément celui que l’on pense, selon Jean-Louis Scandella, Directeur des gestion Actions d’ Ostrum AM.

Points clés

  • Tous les 10 ou 15 ans, des vagues de disruption schumpétériennes viennent secouer les business models les plus solides des sociétés. Depuis les années 2010, celles-ci sont aux prises avec l’extrême digitalisation, un véritable tsunami amené à balayer les unes et propulser les autres vers les sommets. Cette rupture schumpétérienne polarise et oppose, à première vue, les sociétés entre disrupteurs et disruptés.
  • Il serait néanmoins naïf de penser que tous les disrupteurs l’emporteront sur tous les disruptés. L’acheteur de croissance à 5 ans doit fuir le champ de bataille où s’épuisent disrupteurs agressifs et disruptés résistants pour ne s’intéresser qu’aux profiteurs de guerre, ces passagers clandestins de l’extrême digitalisation qui se laissent porter par la vague et prospèrent loin des coups. Ces passagers clandestins peuvent être classés dans des catégories : les fournisseurs, les élargis et les personnalisés de l’extrême digitalisation.
C’est une cause entendue : les actions, ce n’est qu’une histoire de sociétés et, en dernier ressort, le monde de l’equity se divise entre acheteurs de résultats trimestriels et acheteurs de croissance long terme. Quand on achète, comme chez Ostrum AM, un scénario de croissance à cinq ans, la feuille de route est claire : il faut se concentrer sur les sociétés à forte visibilité, et cela passe par un rigoureux examen de leur franchise, de leur management et de leur bilan et par des exigences de solidité clairement définies sur ces trois points. C’est notre définition de la « qualité » et notre conviction est que, plus le niveau de qualité est élevé, plus le scénario de croissance que nous attendons a de probabilité de se matérialiser et de tenir les objectifs de return que nous lui associons.

Pourtant, même en se concentrant sur les meilleures sociétés de la cote, tous les 10 ou 15 ans, des vagues de disruption schumpétériennes viennent secouer les business models les plus solides et remettre en cause les scénarios de croissance les plus soigneusement élaborés.

Dans les années 1980-90, la financiarisation, issue des exigences des fonds de pension américains, a déferlé sur les sociétés européennes, forçant les survivantes à une efficacité opérationnelle redoutable pour l’actionnaire.

Dans les années 1990-2000, la globalisation, née de l’ouverture des grandes économies socialistes ou communistes, a projeté celles qui ne voulaient pas disparaître dans une compétition mondiale et les a contraintes à déployer, avec une efficacité encore accrue, leur franchise à une échelle internationale.

Depuis les années 2010, les sociétés sont aux prises avec l’extrême digitalisation, une troisième vague plus puissante encore que les deux précédentes, et dont on pressent déjà qu’elle balayera les unes et propulsera les autres vers les sommets.

Avant toute chose, il ne faut pas se méprendre : l’extrême digitalisation n’a rien à voir avec la digitalisation, cette innocente innovation technologique qui invitait les sociétés à se coder et à se mettre en ligne. Avec la digitalisation extrême, les sociétés entrent dans le dur du sujet, dans le big data et sa collecte des données traitées par intelligence artificielle, dans la 5G et l’ultraconnectivité de toute chose à un software de programmation centralisé, dans la blockchain et l’explosion même de cette centralisation. La troisième vague est un tsunami et il n’est plus question d’anticiper qui aura la digitalisation facile et qui aura la digitalisation malheureuse : il est question de savoir qui survivra et qui sera emporté.

Par nature, l’extrême digitalisation est une rupture schumpétérienne classique de création/destruction qu’on formule aujourd’hui plus volontiers dans l’opposition disrupteurs/disruptés : de même qu’il valait mieux ne pas investir dans les diligences à l’avènement des chemins de fer, de même il vaudrait mieux aujourd’hui ne pas investir dans les magasins en dur quand le commerce en ligne se généralise… Quand un monde chasse l’autre, l’acheteur de croissance à 5 ans se doit d’être davantage dans la création disruptrice que dans la destruction disruptée. Plût au ciel que les choses fussent aussi faciles ! En effet, toute pertinente qu’elle est, l’analyse schumpétérienne fonctionne davantage comme un instrument d’explication du passé que comme un outil de prévision de l’avenir et nous ne saurons vraiment qui seront les vainqueurs de l’extrême digitalisation qu’à la fin de l’histoire, soit au terme des 5 ans que nous ambitionnons aujourd’hui de modéliser.

Bien sûr, certaines victimes sont déjà évidentes (les magasins de jouets en dur, les centres commerciaux, les agences de publicité du passé), mais il serait naïf de penser que tous les disrupteurs l’emporteront sur tous les disruptés : dans l’automobile, le disrupteur Tesla est à la pointe de la voiture électrique et de la voiture autonome, mais est-il vraiment mieux parti que le disrupté BMW qui met au service de l’extrême digitalisation une créativité et une efficacité opérationnelle internationalement reconnues ? En fait, la bataille sera rude et celui qui la gagnera risque de remporter une victoire à la Pyrrhus.

Que doit alors faire l’acheteur de croissance à 5 ans ? La réponse est claire : fuir le champ de bataille où s’épuisent disrupteurs agressifs et disruptés résistants pour ne s’intéresser – osons le mot – qu’aux profiteurs de guerre, ces passagers clandestins de l’extrême digitalisation qui se laissent porter par la vague et prospèrent loin des coups.

Nous en avons identifié trois types : les fournisseurs, les élargis et les personnalisés de l’extrême digitalisation…

Premièrement donc, l’extrême digitalisation a besoin de fournisseurs. Tandis que la bataille de la disruption automobile fait rage entre Tesla et BMW, les producteurs de semiconducteurs spécialisés se frottent les mains : pour passer de la voiture à combustion à la voiture électrique, il faut multiplier le contenu d’un véhicule en semiconducteurs par deux et pour passer à la voiture autonome, il faut multiplier ce contenu encore par deux… Quelle que soit l’issue de la bataille, les TSMC, les Infineon et les STMicroelectronics seront gagnants.

Deuxièmement, l’extrême digitalisation étend le périmètre d’activité des sociétés les mieux profilées. Tandis qu’Atos et Tata Consultancy ruinent une partie de leur activité (infogérance, intégration de systèmes) à mesure qu’ils déploient leurs nouvelles technologies digitales, Thalès semble s’offrir une nouvelle extension de business à chaque avancée : on parle déjà d’un système d’aiguilleurs du ciel pour drones, de trains sans conducteurs, d’avions sans pilotes…

Troisièmement enfin, l’extrême digitalisation personnalise le contact client des marques les plus identifiées. Loin de la bataille de la distribution où s’épuisent les Amazon et les Wall Mart, les marques de luxe et de quasi luxe comme LVMH, l’Oréal, Inditex, communiquent directement avec leurs clientes par blogueuses et youtubeuses stipendiées, font saliver des badauds virtuels devant des vitrines digitales et inventent en direct une nouvelle dialectique entre vente en ligne et vente en magasins, tout en scellant la relation avec le client final.

En fait, l’extrême digitalisation est presque autant une révolution darwinienne que schumpétérienne où les franchises fortes deviennent encore plus fortes et les franchises faibles disparaissent. Pour l’acheteur de croissance à 5 ans, la voie est claire : dans les turbulences de l’extrême digitalisation, il n’est qu’une issue : fuir les disruptés, être critique avec les disrupteurs et viser les passagers clandestins, en exigeant encore plus de qualité de la franchise, encore plus de qualité du management et encore plus de qualité du bilan…
Rédigé le 30 novembre 2018

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